Intinéraire d’un exilé fiscal

Patrimoine

Le programme fiscal exposé tout au long des débats électoraux par la majorité législative (certes relative) est de nature à inquiéter plus d’un : SMIC à 1600 €, résurrection de l’ISF, tranche marginale de l’IR à 90%, taxation des superprofits, ponction de l’épargne personnelle des Français pour combler la dette de la France et progressivité accrue de droits de succession visant « les plus hauts patrimoines ».  

Avant de s’exiler, voici 4 points à ne pas oublier d’étudier.

  1. Vous pourriez demeurer résident fiscal français.  

Contrairement à une idée reçue, il ne suffit pas de passer plus de 183 jours hors de France pour être considéré comme résident fiscal étranger.

La loi fiscale française prévoit qu’une personne physique est réputée avoir son domicile fiscal en France lorsqu’elle elle dispose en France soit :

  • De son foyer (le foyer s’entendant comme le lieu où la personne ou sa famille résident habituellement lorsque cette résidence a un caractère permanent).
  • Du lieu de son séjour principal : il s’agit là des fameux 183 jours.
  • Du lieu d’exercice d’une activité professionnelle non accessoire.
  • Du centre de ses intérêts économique.

Ces 4 critères sont de manipulation complexe.

Tout d’abord parce qu’ils sont alternatifs (et non cumulatifs). En d’autres termes : il suffit qu’un seul d’entre eux soit rempli et vous serez considéré malgré tout comme résident fiscal français.

Ensuite parce que le juge de l’impôt français considère que le critère des 183 jours n’a d’incidence que lorsque le contribuable ne dispose pas de foyer (par exemple, contribuable célibataire).

Enfin, parce que si la résolution d’un problème de fiscalité internationale nécessite en premier lieu son analyse en droit interne, il convient ensuite de se référer au droit conventionnel qui primera toujours sur le droit interne.

En d’autres termes, vous aurez beau passer moins de 183 jours en France, vous risquez tout de même d’y être considéré comme fiscalement domicilié si votre famille, votre activité professionnelle ou encore le centre de vos intérêts économiques y demeure…  

2. Vous pourriez demeurer (au moins en partie) redevable de l’Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI) voire d’un nouvel Impôt sur la Fortune (ISF).

Une fois bouclée la question de votre résidence fiscale (dont vous vous serez assuré avec soin qu’elle se situe bien au lieu de votre nouvelle terre d’asile), ayez bien à l’esprit que vous pourriez tout de même continuer à payer l’IFI en France.

En effet, bien que domicilié hors de France vous demeurerez soumis à l’IFI à raison des biens immobiliers et droits immobiliers situés en France. 

L’assiette d’imposition s’en retrouvera certes moins large que lorsque vous étiez résident fiscal en France : vous étiez alors imposable sur votre patrimoine immobilier mondial.

A moins que vous ne bradiez votre patrimoine immobilier avant votre départ, vous risquez fort de rester redevable de l’IFI.

3. Vous pourriez avoir à payer de l’exit tax…

L’exit tax a pu être définie comme une « mesure dissuasive qui permet de priver l’exilé fiscal de son expatriation en le taxant de la même manière que s’il n’avait jamais quitté la France ».

A la suite des derniers aménagements issus de la Loi de finances pour 2019, le dispositif d’exit tax peut se résumer ainsi :

  • Les personnes qui transfèrent leur domicile fiscal hors de France ;
  • Détenant dans une société une participation supérieure à 50% ou d’une valeur supérieure à 800 K€ ;  
  • Sont redevables de l’impôt sur la plus-value latente (au flat-tax à 30% ou au barème progressif sur option).

La taxation n’est certes pas automatique : un dispositif de sursis d’imposition vous permettra de ne pas être taxé si :

  • Votre terre d’exil se situe dans l’Union européenne ou dans Etat ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude.
  • Vous en faites la demande expresse.

Mais, pendant 2 ou 5 ans (selon que la valeur de votre participation est inférieure ou supérieure à 2,57 M€) ce sursis est une épée de Damoclès qui peut tomber s’il advient que :

  • Vous manquiez à vos obligations déclaratives.
  • Vous cédiez / donniez votre participation dans la société

 

4. Votre succession demeurera vraisemblablement en tout ou partie taxable en France.  

Et si vous avez des enfants ce n’est pas terminé.

Vous aurez beau avoir réussi à transférer votre domicile fiscal avec brio, en passant au travers de l’IFI et sans payer d’exit tax, vous n’aurez pas pour autant évacué l’épineuse question de vos droits de successions.

Car si vous avez quitté la France, vos enfants, eux, s’y trouveront peut-être le jour de votre décès (ou peut être disposerez-vous encore d’un patrimoine immobilier (conséquent)).

Or, la loi fiscale française, qui tend égoïstement à tout ramener à elle, prévoit que sont taxés en France :

  • Les biens meubles et immeubles situés en France du défunt domicilié hors de France.
  • Le ou les héritier(s) domicilié(s) en France ou qui l’ont été pendant au moins six années au cours des dix dernières années précédant celle au titre de laquelle il reçoit les biens (dans ce cas, les droits de succession/donation s’appliquent à l’ensemble des biens qu’il a vocation à recevoir, situés en France ou à l’étranger).

 

Alors avant de prendre un billet d’avion sans retour aux vues du programme de la nouvelle majorité relative, veillez bien à prendre ces 4 points en considération.

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